Himeji, Koyasan

Après Hiroshima et Miyajima, nous avons fait une courte escale à Himeji. Ville connue avant tout pour son château, réputé pour être le plus majestueux du Japon. Il est l’un des 4 châteaux classés Trésors Nationaux, puisque l’un des rares à avoir échappé aux incendies ou destructions diverses. Et sans doute le plus complet et le mieux préservé de tous.

C’est le dernier château que je vois avant mon départ, et donc cela aurait pu être l’apothéose. Mais on m’avait prévenu lors de l’organisation du voyage que le donjon principal était en rénovation jusqu’en 2014. Cependant, il restait visitable de l’intérieur. Nous étions donc prévenus. Malheureusement, une fois sur place, nous nous apercevons rapidement que l’intérieur du château ne se visite pas non plus pendant ces travaux, et qu’il faut se contenter d’un circuit extérieur.

La majeure partie du château d'Himeji est en travaux. Ca gâche franchement le panorama...

La majeure partie du château d’Himeji est en travaux. Ca gâche franchement le panorama…

Il y a bien la possibilité d’aller directement en haut du donjon (après une queue de 45 minutes…) pour la vue depuis le sommet, mais d’expérience avec les autres châteaux nous n’en voyions vraiment pas l’intérêt.

Nous nous sommes donc contentés de la visite de l’extérieur du château.

Une des portes qu'on franchit pour avancer vers les cours intérieures du château. Comme toujours, elles étaient lourdement conçues et défendues.

Une des portes qu’on franchit pour avancer vers les cours intérieures du château. Comme toujours, elles étaient lourdement conçues et défendues.

Il y avait malgré tout quelques parties en intérieur visitables, avec par exemple une exposition d’armures de samurai :

Quelques-unes des nombreuses armures (une quinzaine) de samurai alignées dans une salle. L'éclairage et leur disposition leur donnaient un air menaçant.

Quelques-unes des nombreuses armures (une quinzaine) de samurai alignées dans une salle. L’éclairage et leur disposition leur donnaient un air menaçant.

 Et puis nous pouvions également visiter toute une aile, où résidait et priait Senhime (la princesse Sen), petite-fille de Tokugawa Iyeyasu (le shogun que vous devez commencer à connaître à force que je vous parle de lui). De longs couloirs en bois, des pièces dépouillées, cela donne quand même un aperçu à Elphie de ce qu’est l’architecture intérieure d’un château japonais.

Une scène de vie de Senhime, jouant aux cartes.

Une scène de vie de Senhime, jouant aux cartes.

Bon malgré tout cette visite offrait quand même quelques belles vues de l’architecture du château, ce qui est d’autant plus frustrant car on peut alors imaginer à quel point il doit être magnifique lorsqu’il est visible dans sa totalité.

Une petite tour adjacente au donjon principal. Le château d'Himeji est souvent appelé le château du Héron, car il est blanc et semble prendre son envol (mais là évidemment ça ne se voit pas). Par contraste avec le château de Matsumoto, le château du Corbeau.

Une petite tour adjacente au donjon principal. Le château d’Himeji est souvent appelé le château du Héron, car il est blanc et semble prendre son envol (mais là évidemment ça ne se voit pas). Par contraste avec le château de Matsumoto, le château du Corbeau.

 Du coup, il n’y avait qu’un nombre très raisonnable de touristes dans l’enceinte du château. Ce qui, conjugué au beau temps, en a fait un moment très sympa quand même. Certaines visiteuses ont même posé pour la photo :

Elles se sont arrêtées spontanément pour prendre la pose, quand elles ont vues qu'on prenait l'allée en photo.

Elles se sont arrêtées spontanément pour prendre la pose, quand elles ont vues qu’on prenait l’allée en photo.

 Au final, cette halte à Himeji est bien sûr décevante car la visite est bien plus bridée que ce que nous pensions. Mais le peu que nous avons pu faire est d’un niveau déjà équivalent à pas mal de châteaux moins connus. Ce n’est donc pas si mal au final, d’autant plus qu’il faisait très beau. Mais attention, si vous prévoyez de visiter Himeji, il est vivement conseillé d’attendre la fin des travaux en 2014. Et j’en reste donc à Matsumoto comme étant le château le plus marquant de mes 3 mois au Japon.

Ces 2 derniers jours, nous n’avions pas Internet, et pour cause: nous étions retirés loin de tout dans un temple! Encore une expérience inédite, et clairement parmi les plus originales et dépaysantes du séjour. Ce temple, c’est le Fugenin, situé au Koyasan (Mont Koya). Le Koyasan est un des lieux les plus sacrés de la secte Shingon, une branche importante du bouddhisme japonais. Attention, secte n’a rien de négatif dans ce sens, cela veut simplement dire un courant du bouddhisme. Celui-ci a été fondé par Kukai Kobo Daishi dont je vous ai déjà parlé lorsque j’étais à Shikoku. Et c’est donc au Koyasan qu’il avait décidé d’établir sa secte en 816. En effet, ce plateau situé à 900m d’altitude devait être particulièrement isolé du monde à l’époque, et donc favorable à la méditation.

C’est donc un lieu rempli de temples (117 au total) qui nous attendait, de ce côté là c’est clair, nous avons fait le plein!

Comme il n’y a pas d’hôtels au Koyasan, ce sont les temples qui accueillent pèlerins et touristes, et c’est ce qui en fait une expérience aussi particulière.

La porte d'entrée du temple qui nous logeait pendant 2 nuits, le Fugenin.

La porte d’entrée du temple qui nous logeait pendant 2 nuits, le Fugenin.

La cour intérieure du temple. On aperçoit Koyakun, la mascotte du Koyasan (il y a des mascottes pour tout et n'importe quoi au Japon).

La cour intérieure du temple. On aperçoit Koyakun, la mascotte du Koyasan (il y a des mascottes pour tout et n’importe quoi au Japon).

L’hébergement était moins spartiate que ce à quoi nous nous attendions. Nous disposions d’une jolie chambre traditionnelle type ryokan, et de tout le confort moderne. Seul le bain/douche devait se faire dans les parties communes type onsen.

Concernant les repas, le Koyasan est connu dans tout le pays pour sa cuisine végétarienne appelée shojin ryori. Pour être honnête, le plus appréciable dans tout ça, c’était notre salle « privée » de repas, typiquement japonaise:

Notre salle de repas, chauffée, contrairement au reste du temple.

Notre salle de repas, chauffée, contrairement au reste du temple.

Au menu, c’était donc légumes matin et soir, avec du tofu, du riz et du thé. Avec ça, notre estomac d’omnivore était loin d’être rempli, et on avait faim le reste de la journée. Et puis bon, au niveau goût, ce n’était pas extraordinaire non plus: pas mauvais en soi, mais insipide. Donc après 2 jours de diète comme ça, nous étions bien contents de retrouver autre chose aujourd’hui après notre départ. Je tire mon chapeau aux moines pour survivre avec uniquement ça tous les jours.

Ce qui nous a le plus marqué, et qui est un des moments forts de mon voyage, c’est que nous étions « invités » (obligés) à assister à la cérémonie religieuse du matin, à… 6h30. Nous nous y étions préparés, et c’était une super expérience. Evidemment on se sent un peu perdu et mal à l’aise, notamment auprès des autres pratiquants qui y assistent, mais les moines sont très ouverts et compréhensifs. Je pense qu’ils sont plutôt contents qu’on s’intéresse à ce qu’ils font, même si nous ne sommes pas du tout adeptes de ces pratiques. Et puis ce n’est pas trop long, 30 à 45 minutes maximum. Bien sûr les photos étaient interdites, c’est normal. De toute façon c’est quelque chose à vivre plutôt qu’à voir.

Le lieu le plus sacré du Koyasan, c’est Okunoin. Il s’agit d’un cimetière très étendu le long d’une allée de 2 km, avec 200.000 tombeaux de personnes de toutes origines, dont certaines célèbres dans l’histoire du Japon.

La longue allée, bordée de tombeaux et de nombreux symboles bouddhistes.

La longue allée, bordée de tombeaux et de nombreux symboles bouddhistes. En forêt, c’est assez unique comme atmosphère, loin du monde.

Une vue typique de l'Okunoin. On peut voir un torii, que je croyais reservé au culte shinto...

Une vue typique de l’Okunoin. On peut voir un torii, que je croyais réservé au culte shinto…

Parmi tout ce que l’on peut voir dans ce gigantesque endroit, il y a les gorinto. Ce sont des symboles de la pensée bouddhiste, qui représentent les 5 éléments de l’univers: la terre, l’eau, le feu, le vent et le ciel.

Dans la secte Shingon, les éléments sont représentés ainsi (de bas en haut dans la photo): le carré = la terre; la boule = l'eau; le triangle = le feu; la demi-lune = le vent; la larme = le ciel.

Dans la secte Shingon, les éléments sont représentés ainsi (de bas en haut dans la photo): le carré = la terre; la boule = l’eau; le triangle = le feu; la demi-lune = le vent; la larme = le ciel.

Une autre figure que l’on retrouve fréquemment, c’est Jizô, le protecteur des enfants. Il est souvent paré d’un bavoir rouge, qui est mis par des parents souhaitant qu’il s’occupe de leur enfant défunt, ou qu’il assure bonne santé à leur(s) enfant(s).

Une ligne de statues de Jizô, qu'on trouve en quantité dans Okunoin.

Une ligne de statues de Jizô, qu’on trouve en quantité dans Okunoin.

Dans le fond de Okunoin, le lieu le plus saint de tout Koyasan : le Toro-do, qui est le mausolée de Kukai. Dans tout le périmètre, les photos sont interdites. Dommage car il y a des milliers (plus de 10.000) lanternes accrochées sous les toits tout autour du mausolée, qui donnent un aspect très spectaculaire au temple.

Un peu avant ce périmètre réglementé, une rangée de très grands Jizô (Mizu-muke-Jizo), que les gens arrosent pour apaiser l’âme des ancêtres.

Le Mizu-muke-jizo.

Le Mizu-muke-jizo.

Ceci constitue la plus marquante de nos visites lors de notre séjour au Koyasan, et pour moi ne ressemble à rien d’autre de tout ce que j’ai pu voir depuis 3 mois. Un lieu vraiment à part.

Tout étant situé dans quelques kilomètres carrés au Koyasan, cela permet de voir beaucoup de choses en peu de temps. Ainsi, après l’Okunoin, direction le Kongobuji, qui est le quartier principal du courant Shingon, et donc le plus grand temple (probablement) du Koyasan.

Le Kongobuji.

Le Kongobuji.

Une des portes d'entrée vers le Kongobuji.

Une des portes d’entrée vers le Kongobuji.

Ensuite, un passage rapide vers le mausolée des Tokugawa (Tokugawa-ke Reidai). Construit par Tokugawa Iemitsu (le 3ème shogun des Tokugawa) en 1643, en l’honneur des 2 premiers de la lignée (Tokugawa Ieyasu et Tokugawa Hidetada). En fait, ce sont 2 monuments identiques.

Richement décorés, sculptés et dorés de toutes parts, ces mausolées illustrent bien la puissance des personnages qu'ils célèbrent.

Richement décorés, sculptés et dorés de toutes parts, ces mausolées illustrent bien la puissance des personnages qu’ils célèbrent.

La plus grande concentration d’édifices bouddhistes du Koyasan se situe au Danjyo-garan, lieu dédié aux exercices spirituels. La plupart de ces bâtiments, initialement construits il y a très longtemps, ont brûlé à un moment ou à un autre et ont du être reconstruits. Les bâtiments actuels (une vingtaine) datent donc d’époques diverses, mais certains sont très anciens.

Vue générale, avec notamment le Miedo à gauche, le Konpon-daito au milieu (49 mètres de haut), et le Kondo à droite.

Vue générale, avec notamment le Miedo à gauche, le Konpon-daito au milieu (49 mètres de haut), et le Kondo à droite.

Le Miedo était utilisé comme temple bouddhiste personnel et lieu d'exercice de Kobo-Daishi. L'édifice actuel date de 1847.

Le Miedo était utilisé comme temple bouddhiste personnel et lieu d’exercice de Kobo-Daishi. L’édifice actuel date de 1847.

Le Saito, 27 mètres de haut.

Le Saito, 27 mètres de haut.

Et comme dans un jardin japonais, un petit endroit avec de l’eau, le Hasuike:

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Cela fait pas mal de temples au m²! On finit par ne plus savoir qui est qui et ce qu’ils représentent.

Et pour finir, un détour vers l’immense porte d’entrée du Koyasan, sans doute là où auparavant devaient passer les gens arrivant au Koyasan. La Daimon est particulièrement impressionnante, haute de 25 mètres et sans doute au moins aussi large. C’est la plus grande « porte » de lieu sacré que j’ai vu de tout mon séjour au Japon jusque là.

La Daimon du Koyasan.

La Daimon du Koyasan. La personne au pied de la porte vous donne une idée de l’impression de grandeur qui s’en dégage.

Ce séjour de 2 jours au Koyasan est une coupure nette avec le monde et la foule. Dormir dans un temple et assister à la cérémonie religieuse est un moment très fort. Notre redescente vers la grande ville de Kyoto aujourd’hui nous a fait prendre la mesure du caractère unique de ce lieu et de l’atmosphère qui s’en dégage. Les litanies des moines vont rester longtemps dans nos têtes.

Assez paradoxalement, les gens à Koyasan conduisent n’importe comment, souvent trop vite et assez dangereusement. Comme je n’en ai pas vraiment vu ailleurs au Japon. Très surprenant dans un lieu aussi enclin à faire prendre son temps.

Dernière étape : Kyoto et Nara, au prochain article…

じゃね!